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24 janvier 2019 – 24 janvier 2021 : En deux ans, F. Tshisekedi a réussi à mettre J. Kabila à l’ombre

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24 janvier 2019 – 24 janvier 2021 : En deux ans, F. Tshisekedi a réussi à mettre J. Kabila à l’ombre

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Par N.T. !

Usant de beaucoup de tact, l’actuel Chef de l’Etat est parvenu à arracher à son prédécesseur et « partenaire » dans la coalition FCC-CACH le contrôle de l’appareil judiciaire, du commandement de l’Armée et de la majorité à l’Assemblée nationale
Dimanche 24 janvier 2021, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo a totalisé deux ans à la tête de la République démocratique du Congo. Le 24 janvier 2019 au Palais de la Nation à Kinshasa, quand le Président sortant, Joseph Kabila Kabange, cède l’écharpe présidentielle à F.A. Tshisekedi, ce dernier est considéré par l’opinion publique comme un Président de façade ou presque.

Dans un régime semi-présidentiel et semi-parlementaire, Joseph Kabila espérait continuer à avoir la mainmise sur le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif, car le gouvernement est une émanation de l’Assemblée nationale. C’est ainsi qu’il a contraint son successeur à gouverner avec lui dans la coalition FCC-CACH, afin d’éviter la cohabitation.

Dans cette coalition, le Président de la République et autorité morale de la plate-forme CACH (Cap pour le changement) ne pouvait prendre aucune décision importante sans se référer à J. Kabila, autorité morale du FCC (Front Commun pour le Commun).
L’exemple le plus éloquent est celui des Ordonnances signées en mai 2019 par le Chef de l’Etat, portant nomination des membres des Conseil d’administration de la Gécamines et de la Société nationale des chemins de fer du Congo (SNCC). Le Chef de l’Etat avait signé ces Ordonnances sans en référer à l’autorité morale du FCC. Ce dernier aurait intimé l’ordre au ministre du Portefeuille (membre du FCC) du Gouvernement Tshibala et à son successeur (lui aussi membre du FCC) du Gouvernement Ilunga Ilunkamba de ne pas signer l’arrêté permettant leur mise en application.

Ces Ordonnances n’ont été mises en application que plus d’année après leur signature, à l’issue des négociations de partage des entreprises publiques entre le CACH et le FCC. Le 5 avril 2019, près de deux mois et demi après son accession au pouvoir, Félix Tshisekedi a effectué son premier voyage officiel aux Etats Unis d’Amérique. A cette occasion, il a annoncé lors d’une conférence au Council on Foreign à Washington : « Je le dis sans peur. Je suis là pour déboulonner le système dictatorial qui était en place ».
La démission du juge constitutionnel Benoît Lwamba, un déclic

Le Président Tshisekedi a profité d’une brèche que lui a offerte en juin 2020 la démission du Président de la Cour constitutionnelle, Benoît Lwamba, un proche de Kabila qui a pris soin d’annoncer cette décision à partir de la Belgique. L’autorité morale du FCC n’avait pas été informée à l’avance de cette défection.

Le Président Tshisekedi en a profité pour nommer, en juillet 2020, trois nouveaux juges constitutionnels : un juge pour remplacer Benoit Lwamba et deux autres pour remplacer deux juges constitutionnels promus à la Cour de cassation avec leur consentement. Quelques semaines plus tard, ces deux juges, sur pression du FCC, ont contesté leur remplacement à la Cour constitutionnelle, mais ils l’ont fait hors du délai légal.

Le Chef de l’Etat a profité de la même occasion pour signer plusieurs dizaines d’ordonnances portant nominations au sein de la Magistrature et des Forces Armées de la RDC (FARDC). Ces ordonnances ont été contresignées par le Vice Premier ministre en charge de l’Intérieur, en lieu et place du Premier ministre, qui était en mission au Katanga. Le FCC a fait pression sur le Premier ministre pour qu’il déclare publiquement, à travers son porte-parole, qu’il ne reconnaissait pas toutes ces ordonnances.

Les ténors du FCC ont crié au scandale, en accusant le Chef de l’Etat d’avoir violé la Constitution en nommant trois juges de la Cour constitutionnelle au lieu d’un seul. Ayant compris qu’ils venaient de perdre le contrôle de la Cour constitutionnelle, ils ont fait pression sur Félix Tshisekedi pour l’amener à rapporter les ordonnances portant nomination des juges constitutionnels. Ce dernier est resté de marbre.
Le changement intervenu à la Cour constitutionnelle a fait perdre à Kabila et à ses partisans l’espoir de voir l’autorité morale du FCC revenir au pouvoir à l’issue des élections de 2023. Sa candidature devra passer par la Cour constitutionnelle, qu’il ne contrôle plus.
Quand de nombreux leaders politiques, députés et sénateurs du FCC se sont rendus compte de cette réalité, ils ont commencé à quitter le navire avant que celui-ci fasse naufrage.

C’est ainsi qu’à l’issue des consultations politiques qu’il a organisées en septembre et octobre 2020, le Président Tshisekedi n’a pas hésité de dire que la majorité à l’Assemblée nationale s’est effritée. Il a, à cette occasion, annoncé la fin de la coalition FCC-CACH et la mise en place d’une large coalition dénommée « Union sacrée de la Nation ». La déchéance le 10 décembre 2020 du bureau FCC de l’Assemblée nationale par 281 députés sur 500 apparait comme le coup de grâce pour Kabila et sa plate-forme.

L’Union sacrée de la Nation compterait à ce jour un peu plus de 300 députés, dont un grand nombre vient du FCC. Avec cette nouvelle Majorité, la démission du Premier Ministre issu du FC, Ilunga Ilunkamba est désormais acquise malgré l’entrée en rébellion de ce dernier vis – vis du Chef de l’Etat.