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VSBG : témoignage poignant de deux survivantes sur les difficultés à saisir la justice

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VSBG : témoignage poignant de deux survivantes sur les difficultés à saisir la justice

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Par TSM

En République Démocratique du Congo des survivantes des violences sexuelles basées sur le genre (VSBG) sont butées à plusieurs obstacles qui les empêchent de saisir les instances judiciaires. D’une manière générale, l’ignorance et le manque de moyens financiers ont été évoqués par deux survivantes abordées comme étant des obstacles majeurs.

Selon le Fonds des Nations-Unies pour la Population (FNUAP), la violence à l’égard des femmes et des filles est l’une des violations des droits fondamentaux les plus fréquentes dans le monde.

“Bien que la violence sexuelle et basée sur le genre (VSBG) mette en péril la santé, la dignité, la sécurité et l’autonomie de ses victimes, elle reste entourée d’une culture du silence”, informe le FNUAP. Ernestine (nom d’emprunt), compte sortir d’un mariage où elle a vécu la violence psychologique, les injures, le traumatisme, les querelles récurrentes parfois l’agression physique jusqu’à connaître des ennuis de santé.

“Est-ce qu’à mon âge je peux frôler l’AVC”, a déclaré cette femme d’une trentaine d’années qui s’en est sortie avec des séquelles au pied droite. Elle a également fait savoir qu’une fois “mon mari m’a poussé pendant une grossesse de sept mois tout simplement pour lui avoir demandé l’argent de l’examen prénatal”.

Cette femme a indiqué qu’elle a dû encaisser beaucoup de choses qu’elle ne devrait pas dans son foyer à cause de l’ignorance et par manque des moyens. Par la suite, cette situation a engendré en elle une certaine révolte parce qu’elle ne pouvait plus vivre dans ce genre d’environnement hostile à son épanouissement mental et physique.

“Avant d’avoir le courage d’engager une action en justice pour demander le divorce, j’ai pris le courage d’aller, moi-même, dans un parquet pour exposer mon cas à un avocat étant ignorante. C’est grâce à ses explications et orientations que je suis actuellement en procès avec mon mari pour rentrer dans mes droits. J’ai préféré demander carrément le divorce, après dix ans de mariage et deux enfants, pour préserver ma vie”, a raconté Ernestine pleine d’amertume.

Elle a également indiqué que le manque de moyens financiers constitue un frein pour accéder à la justice. Heureusement pour elle, c’est sa famille qui l’accompagne financièrement. Sans cela, elle ne pouvait s’en sortir, surtout que son époux l’avait empêchée de travailler.

Dans l’attente d’un procès, cette jeune dame dit avoir trouvé la paix du cœur parce que son homme a désormais peur de la brutaliser. C’est ainsi qu’elle a conseillé aux autres femmes vivant les VSBG de briser le silence en recouvrant leurs droits.
Mme Ernestine pense que les femmes qui se trouvent dans son cas peuvent aussi se tourner vers les organisations qui défendent les droits féminins, avant d’admettre qu’elles sont importantes bien même elle n’a aucune connaissance sur ces organismes.

Pour sa part, Odette est sortie d’un mariage violent après sept ans de vie commune. Suite à son ignorance et au manque d’argent elle a préféré partir avec leur deux enfants au lieu de saisir la justice.

” J’avais un mari violent. Très souvent, lorsqu’il rentrait tardivement à la maison, je ne devais rien lui demander sinon tout allait se régler par la violence. En sept ans de mariage, nous avons changé six maisons à louer étant donné qu’il y avait tout le temps des bagarres.

Je me souviens qu’une fois il est rentré à 2h du matin et s’en est pris à moi jusqu’à 6h du matin. Nous avons été chassés de la parcelle par la bailleresse qui avait peur du pire si on restait dans sa parcelle “, a-t-elle révélé. Il est même arrivé que le père de ses enfants lui a jeté de l’eau chaude au dos lors d’un malentendu, a témoigné Mme Odette. Suite à ces agressions physiques, cette mère de deux enfants a connu des complications d’yeux, avant de notifier qu’elle voit difficilement la nuit. Elle avait également perdu toute sa beauté.

Pour elle, c’était préférable de regagner le toit parental que de mourir dans un foyer où elle ne représentait plus rien pour son conjoint. En droit congolais, l’article 47 du code pénal stipule que ” Si les coups et blessures ont causé une maladie ou une incapacité de travail personnel, ou s’il en est résulté la perte de l’usage absolu d’un organe ou une mutilation grave, les peines seront une servitude pénale de deux ans à cinq ans et une amende qui ne pourra excéder mille franc congolais “.

Serge Ndongo Chargé de Programmes à la Coalition des Femmes pour la Paix et Développement (CFDP), révèle que, outre les questions financières, l’ignorance de fonctionnement du système judiciaire de notre pays par la femme victime est parmi les difficultés majeures. “Il n’y a pas que celle victime de VSBG, mais d’une manière générale elle ne sait même pas où aller poser son problème”.

A l’en croire, pour aider ces femmes survivantes, son ONG sensibilise la communauté par rapport à la prise en charge juridique et judiciaire des victimes des violences sexuelles basées sur le genre (VSBG). Raison pour laquelle, les acteurs communautaires sensibilisent dans des marchés ainsi que les leaders communautaires.

Avocat de son état, Me Liévin Kibungula a reconnu l’ignorance comme faisant partie d’obstacles qui empêchent les survivantes d’accéder en justice. ” Quelqu’un qui ne connaît pas, c’est normal qu’il puisse ignorer même perdre certains de ses droits”, a-t-il précisé.

Il a également souligné que les multiples frais de justice qui sont à charge des survivantes constituent un grand problème. ” Sans argent vous ne pouvez pas revendiquer vos droits. Pour dire que c’est le premier obstacle qui les empêche de saisir la justice”, a déclaré le Coordonnateur national du Collectif des avocats de la LIZADEEL.

Pour lui, la société civile est en train de se battre de manière à obtenir une loi portant exemption des survivantes de violences sexuelles et des témoins. Cela, dit-il, peut être un des premiers pas pour qu’elles accèdent en justice.