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Tensions au Sankuru et au Kasaï: les pistes de solution

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Tensions au Sankuru et au Kasaï: les pistes de solution

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Redoutant une crise aux résonances ethniques, une ONG attachée à l’Université de New-York appelle à un dialogue  entre populations locales et responsables politiques des assemblées provinciales ainsi que des gouvernements provinciaux
Par GKM

Le Groupe d’Études sur le Congo (GEC), organisation de droit américain attachée à l’Université de New York vient de publier un rapport daté du mois de juin 2019 dans lequel un accent particulier est mis sur les tensions politiques qui secouent les provinces du Kasaï et du Sankuru.

Pour le GEC,  les tensions politiques au Kasaï Central et au  Kasaï, (deux provinces issues de l’ex-province du Kasaï occidental) prennent des résonances ethniques dans certains cas, et devraient faire l’objet d’échanges réguliers entre les populations locales et les responsables politiques au sein des assemblées provinciales et des gouvernements provinciaux.

Concernant la nouvelle province du Sankuru, l’ONG de droit américain attachée à l’Université de New-York pense que  les acteurs impliqués dans la crise politique dans cette région de la RDC doivent avoir une lecture non seulement juridique, mais aussi politique.

C’est-à-dire que la solution au problème ne doit pas se trouver dans le système judiciaire, comme c’est le cas actuellement, car des conflits  politiques se jouent à travers des actions juridiques.
Selon le Groupe d’Études sur le Congo, l’organisation de l’élection du gouverneur qui va de report en report ne peut qu’être perçue comme une phase vers l’escalade ou la baisse des tensions politiques  qui ont également des résonances ethniques.

Ainsi, il faudrait d’abord organiser un cadre de discussion entre les acteurs impliqués (y compris les tireurs de ficelles basés à Kinshasa) avec l’implication de différents membres des communautés locales du Sankuru, qui sont censés représenter la diversité d’opinions politiques.

Les initiatives décrites ci-haut pourraient s’inspirer du travail effectué par l’ONG « Leadership Cohésif » au Kivu  dans le cadre de la résolution des conflits avec des acteurs locaux et nationaux.
La leçon qu’ils ont tirée de leur expérience, c’est l’importance de créer des espaces et cadres de dialogue informels, où les acteurs peuvent échanger librement et entrer en profondeur sur les causes des problèmes et les moyens pour les résoudre.

Recommandations

En ce qui concerne les deux provinces issues de l’ex-province du Kasaï Occidental (le Kasaï et le Kasaï central) citées dans ce rapport, le GEC affirme avoir relevé des contestations politiques liées à la composition des gouvernements provinciaux et, pour le Sankuru (une province issue du Kasaï Oriental démembré), la course au gouvernorat se révèle problématique.

Toutefois, l’ONG préconise un examen approfondi de ces  différentes controverses, afin d’avoir une compréhension plus profonde des dynamiques politiques de ces provinces.
A titre de rappel, dans son rapport mensuel de mai 2019 sur la région du Kasaï, le GEC avait noté que le gouvernement nommé par le gouverneur Martin Kabuya au Kasaï Central avait  suscité des polémiques, notamment par l’absence des membres du PPRD, le parti de l’ex Président Joseph Kabila, disposant du plus grand nombre de sièges à l’Assemblée provinciale.

Et ce, principalement au profit des politiciens d’Ensemble pour le changement, précisément ceux issus des partis politiques de deux députés nationaux de grande importance de la province, Delly Sesanga et Claudel André Lubaya.
Les contestations autour du gouvernement de cette province étaient donc liées à la représentativité de différents partis et coalitions politiques au sein de l’équipe gouvernementale provinciale.

Le mauvais partage des institutions parmi les causes

A en croire le GEC, dans la province du Kasaï, on a assisté à des contestations d’un autre type.  Dans cette contrée, note le rapport, des tensions sont dues, soit à la non représentativité au gouvernement de différents territoires et communautés, soit, dans une moindre mesure, à l’absence de certains partis et coalitions politiques.
Cette différence peut être attribuée à la présence de multiples communautés au Kasaï, sans qu’il y en ait une qui prédomine sur le plan démographique.

Pour rappel, la province de l’Unité kasaïenne, créée en 1962, dont les frontières chevauchent en partie celles de l’actuelle province du Kasaï, avait été conçue comme un regroupement des  Communautés minoritaires pour faire face à la prédominance lubaphone dans la région correspondant à l’ex Kasaï Occidental.
Ainsi, lors de la décentralisation de 2015, les notables et politiciens de la future province du Kasaï s’étaient réunis au Centre Nganda, à Kinshasa, pour discuter de la répartition des institutions provinciales entre les différentes communautés.

D’autant que cette question était au centre de grandes contestations sous l’ancien gouverneur Marc Manyanga qui était en conflit ouvert avec son vice-gouverneur, Hubert Mbingho. Le GEC relève que ces conflits sont revenus sous forme de protestations de différentes communautés et partis politiques contre la composition du gouvernement provincial.
C’est bien là un symptôme de la fragmentation de la province. Ceci expliquerait également pourquoi l’annonce  des membres du cabinet du gouverneur et des ministres provinciaux avait traîné. Mais il semble qu’il n’a pas été possible de servir tout le monde.

Hormis les tentatives de faire en sorte que les différentes communautés et grandes composantes politiques se retrouvent, il a été constaté une omission remarquable au sein du gouvernement : celle de la communauté Kuba, qui est composée de différents groupes, dont les Bushoong, les Ngende, les Ngongo et les Mpiang.

Une configuration difficile à expliquer, lorsque l’on sait que le gouverneur Pieme est lui-même Kuba, tout comme son parrain politique, Evariste Boshab. En plus, sur les trois députés nationaux de Mweka, deux sont Bushoong, et quatre sur six  députés provinciaux de Mweka sont Bushoong, signale le GEC dans son rapport.

Dans une logique communautaire, l’on s’attendrait ainsi à retrouver des membres de la communauté Kuba au gouvernement pour le compte du territoire de Mweka, afin que Boshab et Pieme puissent y imposer leur influence. Et pourtant, il n’y en a qu’un seul, Pauline Mbidi Ndondo, la ministre du Genre, Famille, Santé et Civisme (Ngongo de Mweka).

La stratégie de Boshab décriée

Selon le GEC, la stratégie d’Évariste Boshab (un proche de Joseph Kabila candidat proposé par ce dernier à la 1er Vice-présidence du Sénat alors qu’il est sous le coup des sanctions de l’Union Européenne) viserait à exercer son influence à travers des alliés issus d’autres communautés, afin d’échapper aux accusations de «tribalisme».

A part la ministre Ndondo, seuls le  secrétaire exécutif du gouvernement provincial, Jacob Pemebelongo Bomilongo, qui a le rang de ministre, et son conseiller chargé des questions politiques et coutumières, Célestin Nono Katumba, sont Kuba. Pembelongo est Ngende de Bolempo (le groupement d’origine de Boshab) et peut se prévaloir des relations proches avec les Mpiang du côté maternel. Nono Katumba est Mpiang de Kakenge      (Mweka) et cousin du gouverneur Pieme.

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