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Avec l’arrestation du policier Doudou Ngoy et le mandat d’arrêt lancé contre John Numbi: le décor planté pour la reprise du procès Chebeya

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Avec l’arrestation du policier Doudou Ngoy et le mandat d’arrêt lancé contre John Numbi: le décor planté pour la reprise du procès Chebeya

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Par GKM

L’interpellation récente du brigadier en chef Doudou Ngoy Ilunga, impliqué dans l’assassinat de Floribert Chebeya et Fidèle Bazana, suscite l’espoir pour la reprise du procès sur le meurtre de ces deux défenseurs des droits de l’homme survenu en 2010. Un procès dont l’issue devrait permettre de connaître enfin toute la vérité sur cette affaire.

L’affaire, on le sait, avait été relancée en 2021 par les témoignages de certaines personnes reconnaissant avoir participé à ce double assassinat. L’un des complices nommé Doudou Ngoy Ilunga vient d’être arrêté et transféré à Kinshasa. Ce qui redonne de l’espoir aux familles et aux défenseurs des droits humains pour la reprise du procès, avec, cette fois, une mise en cause du général déserteur John Numbi.

Onze ans de cavale

La cavale de Doudou Ngoy Ilunga aura duré onze ans. Sa fuite s’est s’est terminée le mardi 24 aout 2021 dans une banque de Lubumbashi, où le fugitif était allé retirer pour sa solde. Doudou Ngoy Ilunga a toujours nié son implication dans l’élimination du militant des droits humains et de son chauffeur. Mais Hergile Ilunga, témoin de ces assassinats, assure que Doudou Ngoy était bel et bien présent sur les lieux du crime.

Ce complice avait été d’ailleurs muté hors de Kinshasa au lendemain de l’assassinat de Floribert Chebeya.
« Dernièrement, il était ici à Lubumbashi, et a stationné à la frontière avec la Zambie dans le bataillon Simba », confirme Hubert Tshiswaka Masoka, avocat et directeur général de l’Institut de recherche en droits humains, basé à Lubumbashi.

Rostin Manketa, directeur exécutif de la VSV, organisation fondée par feu Floribert Chebeya, se félicite de l’interpellation et du transfèrement à Kinshasa de Doudou Ngoy Ilunga. Mais le directeur de la Voix des sans voix reste prudent et rappelle qu’il s’agit « de la quatrième arrestation après celle de Christian Ngoy Kenga Kenga, de Jacques Mugabo et, tout récemment, du général Djadjidja ».

Tout en saluant « de grandes avancées », Rostin Manketa souhaite surtout « la reprise du procès en vue de lutter contre l’impunité des crimes touchant les défenseurs des droits humains en République démocratique du Congo. »

Vigilance avant la reprise du procès

Le responsable de VSV appelle aussi à la vigilance tant que la reprise du procès n’a pas eu lieu. « Nous ne souhaiterions pas apprendre un de ces quatre matins que les personnes qui avaient été arrêtées se sont évadées ou bien se sont donné la mort dans le but d’effacer les traces», a-t-il averti.

De son côté, l’avocat Hubert Tshiswaka estime que cette nouvelle arrestation redonne «beaucoup d’espoir, et pas seulement aux familles biologiques des victimes».  Mais d’une reprise du procès avec cette fois un prévenu haut placé en la personne de l’ancien chef de la police, le général John Numbi, considéré comme le commanditaire principal de ces assassinats.

Etablir les responsabilités pour rendre justice

L’auditeur militaire de la Haute cour supérieure est en train d’instruire ce procès sous de nouveaux aspects qui n’ont pas été éclairés. Après le procès en appel, on a décidé de poursuivre les investigations pour éclairer les zones d’ombre, résume Hubert Tshiswaka Masoka.

« Il y a beaucoup de présomptions, des gens qui disent que c’était le général John Numbi qui était à la tête [commanditaire principal de ces assassinats] et nous, comme défenseurs des droits de l’Homme, nous encourageons le ministère public à aller jusqu’au bout pour que nous soyons fixés dans cette affaire », ajoute Me Hubert Tshiswaka.

Hubert Tshiswaka Masoka insiste sur le fait qu’il s’agit bien de la suite de la procédure engagée.« Sinon la défense du général John Numbi va tout de suite évoquer le principe général de droit « Non bis in idem » ; ça veut dire qu’on ne peut pas juger une affaire deux fois.

Il s’agit plutôt de poursuivre les investigations car il y a de nouvelles pistes qui donnent beaucoup de nouveaux éléments. (…) et particulièrement [avec les arrestations de] toutes ces personnes qui étaient en cavale, cachées quelque part, dont une au Sénégal – il y en a déjà quatre en détention, à la disposition du ministère public et qui lui ont donné beaucoup de nouveaux éléments [ce] qui nous donne beaucoup d’espoir pour savoir ce qui s’est exactement passé le 1er juin 2010. » Les proches des victimes accusent John Numbi d’avoir tendu un piège à Floribert Chebeya en le convoquant dans son bureau le 1er juin 2010, la veille du jour où l’on a retrouvé son corps. Un rendez-vous que nie l’ex-chef de la police, John Numbi.